Introduction
La biostatistique est essentielle à l'analyse et à l'interprétation des données en recherche biologique. L'inférence bayésienne est une approche performante de la modélisation statistique en biologie. Elle fournit un cadre pour actualiser les croyances sur des paramètres inconnus à partir de données observées. Ce cours présente les méthodes bayésiennes en biostatistique, en abordant les concepts clés, les hypothèses et les applications de ces techniques.
Contexte historique
Le développement de l'inférence bayésienne remonte aux travaux de Thomas Bayes (1702-1761) et à son célèbre théorème, publié à titre posthume en 1763. La formulation moderne des statistiques bayésiennes a émergé au début du XXe siècle, avec les travaux fondateurs de Ronald A. Fisher, Jerzy Neyman et Brunswick Savage, entre autres. Aujourd'hui, les méthodes bayésiennes sont largement utilisées dans divers domaines, notamment la biologie, la médecine, l'ingénierie, la finance et les sciences sociales.
Concepts clés
- Distribution a priori : distribution de probabilité décrivant les croyances du chercheur sur un paramètre inconnu avant l’observation des données.
- Fonction de vraisemblance : fonction représentant la probabilité d’observer les données données pour une valeur spécifique du paramètre, en supposant que la distribution a priori est vraie.
- Distribution a posteriori : distribution de probabilité combinant les informations a priori et de vraisemblance pour représenter les croyances actualisées sur le paramètre inconnu après l’observation des données.
- Théorème de Bayes : formule mathématique reliant les distributions a priori, de vraisemblance et a posteriori.
- Méthodes de Monte-Carlo par chaînes de Markov (MCMC) : ensemble de techniques numériques permettant d’échantillonner à partir de distributions de probabilité complexes, telles que la distribution a posteriori en inférence bayésienne.
Avantages des méthodes bayésiennes
- Flexibilité : les méthodes bayésiennes s’adaptent à un large éventail de modèles et de croyances a priori, ce qui les rend adaptées à diverses questions de recherche et structures de données.
- Cohérence : le cadre bayésien offre une approche cohérente de l’inférence statistique, car il traite toutes les quantités incertaines (paramètres, données, etc.) comme des variables aléatoires. avec les distributions de probabilité associées
- Interprétation naturelle : Les résultats de l’analyse bayésienne sont des énoncés probabilistes sur les paramètres inconnus, faciles à interpréter et à communiquer.
- Incorporation des connaissances a priori : Grâce aux distributions a priori, les chercheurs peuvent intégrer des connaissances spécifiques à un domaine dans leurs modèles statistiques, améliorant ainsi leur ajustement et prenant des décisions plus éclairées.
- Robustesse : Les méthodes bayésiennes peuvent fournir des mesures de l’incertitude des quantités estimées, permettant ainsi aux chercheurs de quantifier la fiabilité de leurs résultats et de tirer des conclusions appropriées.
Applications en biologie
Les méthodes bayésiennes ont de nombreuses applications en biologie, notamment :
- Génétique et génomique : Inférence de paramètres génétiques des populations, tels que les fréquences alléliques, les taux de mutation et les estimations de flux génétiques.
- Bioinformatique : Analyse de données de séquençage à haut débit (par exemple, RNA-seq, ChIP-seq) pour identifier les gènes différentiellement exprimés, les éléments régulateurs et les réseaux génétiques.
- Biologie évolutive : Estimation des taux d’évolution, des relations phylogénétiques et de l’évolution adaptative.
- Écologie et conservation : Inférence de la taille des populations, des tendances et des paramètres démographiques, ainsi que l’évaluation de la répartition des espèces et de l’adéquation des habitats.
- Recherche biomédicale : Analyse des données d’essais cliniques pour évaluer l’efficacité des traitements, estimer les facteurs de risque de maladie et concevoir des plans d’étude optimaux.
Distributions a priori
Choix d’une distribution a priori
Le choix d’une distribution a priori appropriée est crucial en analyse bayésienne, car elle reflète les convictions du chercheur sur le paramètre inconnu. Les distributions a priori couramment utilisées sont :
- Distribution uniforme
- Distribution normale (gaussienne)
- Distribution bêta (pour les proportions ou les probabilités)
- Distribution gamma (pour les variables continues positives)
- Distribution de Cauchy (pour les données à queue lourde)
Distributions a priori et décisions éclairées
Dans certains cas, il peut être utile d’utiliser des distributions a priori informatives qui reflètent des connaissances spécifiques sur le paramètre modélisé. Cependant, cela peut entraîner des biais potentiels si les hypothèses a priori sont trop fortes ou incorrectes. Il est essentiel de prendre en compte les hypothèses sous-jacentes à la distribution a priori et de s'assurer qu'elles sont cohérentes avec les données disponibles et la question de recherche.
Distributions a priori et ajustement du modèle
Le choix de la distribution a priori peut également affecter l'ajustement du modèle, car il influence la forme et la localisation de la distribution a posteriori. Des distributions a priori trop informatives peuvent entraîner une concentration excessive de la distribution a posteriori autour de certaines valeurs, ce qui entraîne un mauvais ajustement du modèle ou des estimations biaisées. À l'inverse, des distributions a priori non informatives peuvent donner lieu à des distributions a posteriori larges qui ne limitent pas efficacement l'espace des paramètres.
Fonctions de vraisemblance
La fonction de vraisemblance joue un rôle central dans l'analyse bayésienne en représentant la probabilité d'observer les données données pour une valeur spécifique du paramètre inconnu, en supposant que la distribution a priori est vraie. La fonction de vraisemblance permet de mettre à jour les croyances a priori sur le paramètre inconnu en fonction des données observées.
Propriétés des fonctions de vraisemblance
- Non-négativité : La fonction de vraisemblance doit toujours être positive et s'intégrer (ou s'additionner) à 1 sur l'ensemble de l'espace des paramètres.
- Estimation du maximum de vraisemblance (MLE) : La valeur maximale de la fonction de vraisemblance fournit une estimation du paramètre inconnu, en supposant que la distribution a priori est uniforme.
- Test du rapport de vraisemblance : Le rapport des fonctions de vraisemblance de deux hypothèses concurrentes peut être utilisé pour évaluer les preuves étayant chaque hypothèse.
Comparaison et sélection de modèles
Les méthodes bayésiennes offrent un cadre naturel pour la comparaison et la sélection de modèles, car elles permettent de comparer directement différents modèles sur la base de leurs distributions a posteriori. Les critères de comparaison de modèles, tels que le facteur de Bayes ou le critère d'information de Watanabe-Akaike (WAIC), peuvent aider les chercheurs à sélectionner le modèle le plus approprié compte tenu des données disponibles.
Distributions a posteriori et inférence
La distribution a posteriori est une distribution de probabilité qui combine les informations a priori et de vraisemblance pour représenter les croyances actualisées sur le paramètre inconnu après observation des données. La distribution a posteriori fournit une mesure de l'incertitude des paramètres estimés, permettant aux chercheurs de quantifier la fiabilité de leurs résultats et de tirer des conclusions appropriées.
Estimation a posteriori
Différentes méthodes peuvent être utilisées pour estimer la distribution a posteriori, notamment :
- Méthodes analytiques (par exemple, lois a priori conjuguées)
- Intégration numérique (par exemple, échantillonnage d'importance, chaîne de Markov de Monte-Carlo)
- Approximations (par exemple, approximation gaussienne, approximation de Laplace)
Vérifications prédictives a posteriori
Les vérifications prédictives a posteriori sont un ensemble de diagnostics utilisés pour évaluer l'adéquation et la pertinence du modèle choisi. Ces vérifications comparent les données prédites selon la distribution a posteriori aux données observées, aidant ainsi les chercheurs à évaluer l'adéquation de leurs modèles.
Méthodes de Monte-Carlo par chaîne de Markov (MCMC)
Les méthodes de Monte-Carlo par chaîne de Markov (MCMC) sont un ensemble de techniques numériques d'échantillonnage à partir de distributions de probabilité complexes, telles que la distribution a posteriori en inférence bayésienne. Les algorithmes MCMC simulent une chaîne de Markov convergeant vers la distribution de probabilité souhaitée au fil du temps.
Algorithmes MCMC courants
- Algorithme de Metropolis-Hastings
- Échantillonneur de Gibbs
- Monte-Carlo hamiltonien (HMC)
- MCMC à saut réversible
Diagnostic et convergence MCMC
L'évaluation de la convergence d'un algorithme MCMC est essentielle pour garantir que les échantillons simulés sont bien représentatifs de la distribution a posteriori. Les outils de diagnostic courants incluent :
- Tracés de traces
- Tracés d'autocorrélation
- Diagnostic de Gelman-Rubin
- Test de Heidelberger-Welch
Moyennage et prédiction de modèles bayésiens
Le moyennage de modèles bayésiens (BM) est une technique qui combine les données de plusieurs modèles concurrents pour optimiser la précision des prédictions. Dans le BM, les probabilités a posteriori de chaque modèle sont utilisées pour pondérer les contributions des prédictions de chaque modèle.
Avantages du modèle bayésien de moyenne
- Précision des prédictions améliorée : En combinant les données de plusieurs modèles, le modèle bayésien de moyenne permet de produire des prédictions plus précises que n’importe quel modèle isolé.
- Robustesse : Le modèle bayésien de moyenne fournit une mesure de l’incertitude des quantités prédites, permettant aux chercheurs de quantifier la fiabilité de leurs prédictions.
- Comparaison et sélection de modèles : Le modèle bayésien de moyenne offre un mécanisme de comparaison et de sélection entre des modèles concurrents en fonction de leur capacité prédictive.
- Intégration des connaissances a priori : En utilisant des a priori informatifs, les chercheurs peuvent intégrer des connaissances spécifiques à leur domaine dans leur analyse bayésienne de moyenne, améliorant ainsi l’ajustement du modèle et formulant des prédictions plus éclairées.
Critères de sélection et de comparaison des modèles bayésiens
Les méthodes bayésiennes offrent un cadre naturel pour la comparaison et la sélection de modèles en fonction des distributions a posteriori des modèles concurrents. Plusieurs critères peuvent être utilisés pour comparer et sélectionner des modèles, notamment :
- Facteur de Bayes (BF)
- Critère d'information de Watanabe-Akaike (WAIC)
- Critère d'information de déviance (DIC)
- Critère d'information de déviance à validation croisée (xDIC)
Avantages des critères de sélection de modèles
- Règles de décision cohérentes : Les critères de sélection bayésiens offrent des méthodes cohérentes et objectives pour comparer les modèles, réduisant ainsi la subjectivité du processus de sélection.
- Prise en compte de l'incertitude : Grâce à l'utilisation de distributions a posteriori, les critères de sélection bayésiens intègrent l'incertitude liée aux paramètres inconnus dans leurs comparaisons.
- Moyennage des modèles : Les résultats de la comparaison bayésienne permettent de calculer la moyenne des modèles, améliorant ainsi la précision et la robustesse des prédictions.
- Flexibilité : Les critères de sélection bayésiens s'adaptent à un large éventail de modèles et de distributions a priori, ce qui les rend adaptés à diverses questions de recherche et structures de données.
Étude de cas : Étude d'association pangénomique (GWAS) avec des méthodes bayésiennes
Dans cette section, nous allons démontrer l'application des méthodes bayésiennes à une étude d'association pangénomique (GWAS). Un exemple simplifié illustrera les étapes clés de l'analyse GWAS bayésienne.
- Prétraitement des données : Prétraiter les données génotypiques en supprimant les valeurs manquantes et en filtrant pour des mesures de contrôle qualité, telles que l’équilibre de Hardy-Weinberg (HWE) et l’élagage du déséquilibre de liaison (LD).
- Spécification a priori : Choisir une distribution a priori appropriée pour chaque paramètre d’ampleur de l’effet génétique. Par exemple, nous pouvons utiliser une distribution a priori normale avec une moyenne de 0 et un écart type important pour refléter une croyance a priori non informative.
- Fonction de vraisemblance : Modéliser les données génotypiques observées à l’aide d’un modèle mixte linéaire, en intégrant la structure de parenté génétique (par exemple, la matrice de parenté) pour tenir compte de la structure de la population.
- Échantillonnage a posteriori : Utiliser un algorithme MCMC pour échantillonner à partir de la distribution a posteriori des paramètres d’ampleur de l’effet génétique, compte tenu de la distribution a priori et des données génotypiques observées.
- Inférence et interprétation a posteriori : Interpréter les échantillons a posteriori comme des estimations de l’ampleur de l’effet génétique et de leurs incertitudes associées. Effectuer des corrections de tests multiples (par exemple, une correction de Bonferroni) pour contrôler le taux de fausses découvertes.
- Annotation fonctionnelle et analyse des voies de signalisation : Identifier les rôles fonctionnels potentiels des variants génétiques significativement associés en effectuant une analyse d’enrichissement de l’ontologie génétique ou une analyse des voies de signalisation.
- Réplication et validation : Répliquer et valider les résultats dans des ensembles de données indépendants afin d’accroître la confiance dans les résultats.
Conclusion
Les méthodes bayésiennes offrent une approche puissante et flexible de la modélisation statistique en biostatistique, fournissant un cadre pour actualiser les croyances sur des paramètres inconnus en fonction des données observées. En intégrant les connaissances préalables, en tenant compte de l’incertitude et en offrant un moyen naturel de comparer les modèles, les méthodes bayésiennes peuvent conduire à des analyses plus précises et plus robustes dans divers domaines de la recherche biologique.